François Morel

À la fameuse question : « Pensez-vous qu’on peut rire de tout ? », François Morel répond à sa façon : « Oui, mais on n’est pas obligé. »
Quand on lui demande s’il se définit comme un humoriste ou un chansonnier, il préfère le mot « comique », qui est un adjectif, et quand un auditeur l’aborde gentiment pour lui dire : « Je ne rate jamais une de vos chroniques », il répond : « Moi, hélas, ça m’arrive... » !

Ainsi parlait François Morel, l’auteur délicieux de plus de 150 chroniques rassemblées dans ce Bouquin et qui, depuis le 4 septembre 1993, réjouit chaque semaine des millions d’auditeurs de France Inter. Philippe Val, alors directeur de France Inter, lui avait dit qu’il aurait trois minutes pour parler de « l’air du temps », sans obligation, sans impératif, sans même être obligé de « faire de l’humour », ce qui l’avait rassuré car il ne se sent pas toujours d’humeur à plaisanter lorsque le monde est à feu et à sang. En partant du principe que l’humour est un ingrédient et non une discipline, il fait tout à travers ces centaines de pages pour nous faire réfléchir en nous amusant, pour nous émouvoir en nous bousculant, que ce soit en nous donnant des nouvelles du Bon Dieu, de la fête du slip, de Lucchini ou du cardiologue d’Alain Finkielkraut. Il n’hésite pas non plus à flirter avec l’impertinence et la causticité lorsqu’il écrit une lettre à son papa en listant toutes les personnalités qui ont fait la France sans porter un prénom d’origine française ou quand il affirme que la météo fait le jeu du FN. Courageux, François Morel ? Non, réplique-t-il, pas spécialement, mais « libre », oui.

Bien qu’il se dise toujours impressionné par le nombre d’auditeurs à l’écoute, il se rassure en se disant qu’il parle le plus souvent juste à une personne dans sa cuisine, dans sa voiture ou dans sa salle de bains.

Qu’il se fasse poète en rendant un hommage félon à Jean Dutourd en alexandrins ou qu’il s’interroge sur la capacité de Francis Lalanne à déchaîner les passions, Morel croque l’époque dans ce qu’elle a de pire et parfois de meilleur, et ce en quelques minutes.

Yolande Moreau, l’une de ses grandes complices, assure qu’« il nous réconcilie toujours avec la réalité et met du baume sur notre mal au monde ».